Anouar Brahem au ministre de la Culture : « J’ai la désagréable impression que vous vous servez de moi » 

Anouar Brahem au ministre de la Culture : « J’ai la désagréable impression que vous vous servez de moi » 

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L’affaire Moez Mrabet ne cesse de créer la polémique. Rappelons que le directeur du festival de Hammamet a été limogé par le ministre de la Culture Mohamed Zine El Abidine l’année dernière. Le ministre a en effet accusé l’ex-directeur du festival de « mauvaise gestion » et « gaspillage des deniers publics ». Information importante : la validation du budget et du programme se fait avec l’accord du ministre de la Culture, du coup une question se pose : pourquoi ce revirement de situation ? 

 

Nombreux sont les artistes et des parties de la société civile qui ont exprimé leur soutien à Moez Mrabet. Aujourd’hui, un nom s’ajoute à la liste, celui de Anouar Brahem, qui s’adresse au ministre de la Culture dans une lettre assassine, où il dénonce son instrumentalisation et interroge le ministre sur ses réelles motivations. 

Le déroulement des faits me porte malheureusement à croire que votre décision a des motifs aussi douteux qu’inavoués.

L’artiste revient notamment sur la « fan attitude » du ministre lors du concert donné au festival de Hammamet. Le ministre a assisté au live, a demandé à aller rencontrer l’artiste en loge et s’est même donné à une déclaration sur sa page Facebook, pour au final insinuer que la programmation de Anouar Brahem est une faute grave. 

Dans la lettre adressée au ministre, Anouar Brahem, raconte les faits et accuse le ministre d’avoir pris des décisions arbitraires qui ont tué un projet aussi prometteur que le festival de Hammamet. Il dénonce aussi la chape de plomb qui s’abat sur ceux qui veulent innover, et qu’en ces temps troubles cela risque d’aggraver la situation. 

Au-delà de ce lamentable épisode, je ne peux m’empêcher de m’inquiéter pour l’avenir de la culture en général dans notre société. Dans un pays qui se cherche encore et qui a un besoin crucial d’énergies jeunes, créatives et nouvelles, je constate qu’une chape de plomb qu’on croyait appartenir au passé tend à étouffer lentement mais sûrement toute velléité d’invention, de renouvellement, d’innovation. Devrons-nous encore longtemps nous résigner à voir s’étioler toutes nos forces vives ? Combien de temps encore celles-ci devront-elles accepter les diktats et les faits du prince ?
 

En conclusion, la décision du ministre de la Culture ne passe pas, et la scène culturelle du pays se rétrécit comme une peau de chagrin, alors que parallèlement, on vend le rêve d’une cité de la Culture qui donnera des ailes aux artistes et aux producteurs qui ne rêvent que d’une chose : qu’on les laisse faire leur boulot, certains ont l’impression d’être à la merci « des diktats et des faits du prince » comme le dit si bien Anouar Brahem.